Semaine culturelle 2014 des prépas littéraires: visite de l’exposition De Rouge et de Noir. Les vases grecs de la collection de Luynes à la BNF

Au cours de leur semaine culturelle, les étudiants de Khâgne et d’hypokhâgne du lycée Saint-Exupéry ont effectué la visite guidée d’un ensemble exceptionnel de vases grecs et étrusques. Ceux-ci font actuellement l’objet d’une exposition dans le cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de France.

Les étudiants et leur guide:

Cette exposition présente une collection exceptionnelle, celle du Duc de Luynes (1802-1867). Cet aristocrate collectionneur avait en effet réuni, entre 1820 et 1850, un ensemble de vases figurés d’une très grande qualité iconographique, provenant de découvertes archéologiques faites en Toscane (Etrurie) et surtout dans le Sud de l’Italie (surnommée la Grande Grèce dans l’Antiquité à cause du grand nombre de cités que les Grecs y avaient fondées).

Des étudiants attentifs!!

La majorité de ces vases ont été fabriqués dans les meilleurs ateliers de poterie des 6^e – 5^e siècles av J.-C., ceux d’Athènes qui exportaient leur production dans tout le monde méditerranéen. Quelques années avant sa mort, en 1862, le duc de Luynes a légué sa collection à la Bibliothèque nationale de France.

 

 

Ces céramiques antiques ont des formes très variées puisque chacune correspond à un usage particulier.

 

En voici quelques exemples :

 

• Le cratère est un vase à large panse, au col ouvert, doté de deux petites anses. Il en existait de multiples sortes. Il servait au mélange de l’eau et du vin, dans les banquets.

 

 

• Le Kylix est une coupe évasée utilisée pour déguster du vin lors des symposia (banquets réunissant des hommes).

 

 

 

• Le Lécythe se caractérise par une forme allongée, un col et une embouchure étroits ; il est utilisé pour stocker de l’huile d’olive ou de l’huile parfumée destinée aux soins du corps.

 

 

 

 

• L’amphore, qui peut avoir des formes et des tailles différentes, est le récipient le plus utilisé pour le transport de produits de base : le vin, l’huile d’olive, la bière
  

  Un type d’amphore

  etc.

 

 

 

 

 

• Le canthare est un vase profond servant à boire du vin.

 

 

 

 

 

Les plus beaux de ces vases, qui constituaient une vaisselle de luxe, portent encore les magnifiques décors peints parfois par de grands artistes avant leur cuisson au four.

 

Certains sont à figures noires, un style utilisé à Athènes et dans sa région entre la fin du VII^e et le début du V^e siècle av. J.-C. Dans cette technique, les motifs se détachent en noir sur un fond clair. La couleur de fond est soit celle, naturelle, de l’argile utilisée (à Athènes l’argile est très rouge car saturée d’oxyde de fer), soit celle d’un revêtement très clair.

 

Puis, à partir de 530 av. J.-C, apparaît la céramique à figures rouges : le motif, cette fois, apparaît en rouge sur un fond verni de noir. Avec cette technique, les peintres pouvaient préciser les détails à l’aide d’un pinceau fin, notamment ceux de l’anatomie des personnages. La technique de la figure rouge apporte aussi la profondeur qui manque à la figure noire et permet les effets de perspectives.

 

Les peintures qu’on retrouve sur les vases de la collection Luynes sont d’une très grande qualité artistique. Ils illustrent essentiellement des mythes (vie des Dieux et vie des Héros) et font comprendre les mentalités religieuses. Cependant certaines de ces images permettent aussi à l’historien d’avoir une vision des activités et des objets de la vie quotidienne des Anciens (banquets, concours athlétiques, guerre, armes, vêtements…).

 

Voici certaines des peintures sur céramique étudiées par les Khagneux et hypokhâgneux au cours de leur visite guidée :

 

 Zeus

 

 

Lécythe attique à figures rouges attribué au peintre Hermonax, Athènes, 470-460 av J.C.

 

Zeus, le premier des douze dieux olympiens, tient dans ses mains ses deux attributs, la foudre et un sceptre, symbole de son autorité sur les autres divinités.

 

 

 

 

 

Aphrodite et Eros

Coupe attique à figures rouges, Athènes, vers 360 avant J.C.

 

 

Cette image est très originale. Elle représente Aphrodite ( déesse de l’amour) qui jaillit du sol devant Eros (dieu du désir). Traditionnellement, la déesse de l’amour émerge de l’écume de la mer.

Cette image insisterait en fait sur un aspect méconnu d’Aphrodite : déesse de la fertilité, elle est aussi déesse du renouveau de la nature et de la végétation.

Il peut encore s’agir d’une allusion à l’Aphrodite de Delphes dite Aphrodite Épitymbia. L’épiclèse Épitymbia érige la déesse en divinité protectrice du tombeau. L’Aphrodite de Delphes, aux dires de Plutarque, était en relation avec l’au-delà, donc le monde souterrain.

La naissance de Dionysos:

 

Amphore attique à figures noires attribuée au peintre Diosphos, Ahtènes, 500-490 av. J.C.

 

Cette image montre la naissance de Dionysos, fils de Zeus et de la mortelle Sémélé. Après la mort de sa mère, piégée par Héra, Zeus récupère son enfant et le place dans sa cuisse pour qu’il finisse sa gestation.

Dionysos apparaît ici sur les genoux de Zeus alors qu’il vient de sortir de la cuisse de son père.

Furieuse, Héra tend la main vers le jeune dieu, comme si elle tentait de l’empêcher de naître. Son désir de vengeance la conduit d’ailleurs longtemps à tenter de nuire à Dionysos.

 

La folie dionysiaque:

Amphore attique attribuée au peintre d’Achille, Athènes, 450-445 av. J-C . (endroit)

 

Cette image représente le Dieu Dionysos au cours d’une fête où tous les participants, y compris la divinité, s’enivrent et dansent, sombrant dans ce qu’on appelle la folie dionysiaque.

Le Dieu, vêtu de la pardalide (peau de panthère servant de vêtement), tient dans une main le thyrse (grand bâton) et dans l’autre un canthare.

Il est accompagné de Ménades, des femmes possédées qui personnifient les esprits orgiaques de la nature. Avec les satyres, elles forment le « thiase » (cortège) dionysiaque. Elles sont ici couronnées de feuilles de lierre, portent un thyrse, et sont aussi vêtues d’une peau de bête.

Un rite dionysiaque, le diaspharagmos:

Amphore attique attribuée au peintre d’Achille, Athènes, 450-445 av. J-C . (revers)

Le revers de cette même amphore présente le diaspharagmos dont est victime un petit faon coupé en deux dans un accès de furie. Le diaspharagmos est une rite de déchiquetage d’un animal qui doit être ensuite mangé cru. Ce rite est le symbole de la folie destructrice qui peut s’emparer des fidèles de Dionysos au cours d’une fête orgiaque. A droite, on aperçoit un satyre, personnage mi homme mi bête, ici doté d’oreilles d’équidé. C’est un autre membre traditionnel du thiase.

 

 

 

 

Pasiphaé :

Kilyx étrusque à figures rouges, attribuée au peintre de Settecamini, Vulci, début du 4° siècle, av. J.C.

 

Cette peinture représente Pasiphaé, femme du roi de Crète, Minos. Son mari ayant offensé Poséidon en refusant de lui sacrifier un magnifique taureau blanc, le dieu maritime condamna Pasiphaé à s’éprendre de cet animal. De cette passion naquit le minotaure, un monstre possédant le corps d’un homme et la tête d’un taureau.

Cette scène est très originale et rare puisqu’on y voit le minotaure enfant. Il est assis sur les genoux de sa mère qui semble pleine d’amour maternel pour le monstre qu’elle a engendré.

Elle montre aussi l’influence acquise par les mythes grecs chez les Etrusques.

 

 

 

 

Achille:

Canthare attique attribué au peintre d’Erétrie, Athènes, 435-430 av. J-C.

Cette image illustre le départ d’Achille pour la guerre de Troie. Le héros porte l’équipement typique de l’hoplite athénien :

• un casque (krános)
• une cuirasse (thốrax)
• un bouclier (aspís)
• une lance (dóry)
• une épée (xíphos)

Derrière lui, se tient le roi Agamennon, chef de l’expédition grecque contre les Troyens. Face à lui, Cymothée, sœur de sa mère Thétis, lui tend une coupe à libation, rempli de vin, comme il est de tradition avant le départ d’un guerrier.

 

Pour compléter, voir :

http://www.bnf.fr/fr/evenements_et_culture/anx_expositions/f.vases_grecs.html

 

De ces pages Web et du discours du guide lors de la visite est tirée la majorité des renseignements portant sur les exemples de poteries susmentionnés.

 

 

DARIER Jean-Marie

Professeur d’histoire en classes préparatoires aux grandes écoles littéraires,

Docteur en histoire de l’université de Grenoble.