La Locandiera, de Carlo Goldoni à la Comédie française
La Locandiera est une œuvre théâtrale de genre comique de l’écrivain italien Carlo Goldoni publiée en 1753. Nous sommes allés à la représentation du samedi 02 Février 2019 à la Comédie Française. La pièce a été mise en scène par Alain Françon, avec Florence Viala dans le rôle principal. Elle témoigne de la problématique des classes sociales doublée de celle de la puissance de l’argent.
En effet, d’un côté, nous avons le Comte d’Albafiorita (Hervé Pierre), un personnage extrêmement vulgaire qui a acheté son titre, représentant du verbe « avoir » ; de l’autre, le Marquis de Forlipopoli (Michel Vuillermoz) qui incarne cette noblesse que Goldoni combat parce qu’il a ruiné Venise et qui représente le verbe « être ». Il hérite de la tradition du Matamore de la Commedia dell’arte.
Un troisième personnage noble de la pièce, le Chevalier de Ripafratta (Stéphane Varupenne), incarne ce caractère farouche, misogyne, enclin aux jugements à l’emporte–pièce ; il ne veut ni femme ni enfants, il dépense son argent comme il entend sans se soucier du lendemain et dira : « Je m’en fous ».
Au milieu d’eux, Mirandolina représente cette bourgeoisie montante en laquelle Goldoni a confiance et elle affirme les concepts de liberté et réussite de travail. C’est une femme indépendante mais connaissant sa personnalité, son père avant de mourir, lui conseille d’épouser son valet Fabrizio.
Ce personnage est bergamasque, héritier de la tradition d’Arlequin même s’il sort de ces codes, notamment par son langage.
Tous les personnages masculins de la pièce ont ainsi leur grain de folie, héritée de la tradition théâtrale. Mirandolina elle, casse cette tradition car elle est « vraie », à la fois sympathique et antipathique, d’une totale franchise et mène une lutte contre la misogynie du chevalier, d’où elle sortira gagnante. De là, on comprend donc le côté sournois et manipulateur de la femme.
Les deux premiers tiers de la pièce sont très drôles et les idées de mise en scène soulignent un rythme rapide et dynamique. Le dernier tiers est bien plus sombre, après que le Chevalier de Ripafratta a avoué ses sentiments pour l’aubergiste. La fin est brutale, mais touchante, même s’il est clair que les personnages ne seront jamais plus les mêmes : Mirandolina va épouser l’un de ses domestiques, le Marquis et le Comte deviennent des personnages graves, et le Chevalier semble terrassé par ses aveux bafoués. C’est une pièce qui mêle les genres, et la mise en scène d’Alain Françon sait s’adapter au rythme exigé par un texte lui aussi rythmé et dynamique.
En conclusion, c’est une pièce complète, qui aborde de nombreux sujets propres au XVIIIe siècle (mais toujours d’actualité), tantôt avec légèreté, tantôt avec gravité. C’est une pièce qui a beaucoup plu à une majorité de notre groupe, même si certains trouvent que le ton de la fin est trop opposé au reste de la pièce.
Anaïs Loye-Marangone et Lévy Mbang, LS1